lundi, décembre 26, 2005

Meilleurs voeux 2006




En mémoire de Bouna et Zied
En mémoire de la révolte en novembre 2005

La République en question

Selon ses auteurs, l’appel « Nous sommes les indigènes de la République » de décembre 2004 suscitait des réactions très contrastées. La réaction la plus notable était l’enthousiasme avec lequel il fut accueilli par ceux auquel il était destiné; les personnes issues de l’immigration coloniale et celles qui entretiennent un rapport critique avec l’héritage colonial républicain (il aurait reçu plus de 1000 signatures individuelles et associatives en moins de 15 jours). Entre-temps, les autres réactions oscillaient entre manifestations de réserves plus ou moins nettes et franche hostilité. Ce qui suit ici est extrait des commentaires explicatifs sur l'appel donnés par la suite — je ne prétends pas être à jour et les commentaires sont bienvenus évidemment :



Indigènes de la République, réponses à quelques objections...
par Alix Héricord, Sadri Khiari, Laurent Lévy
samedi 26 février 2005

[...]

2) Comment peut-on oser critiquer la République et l’or de ses attributs, les Lumières, l’universalisme, l’égalité... ? C’est se vouer bien sûr à l’obscurantisme, au particularisme, au communautarisme... et autres maléfiques, et parfois anglo-saxonnes, doctrines.

Il est toujours extrêmement difficile de critiquer la République en France, soit « le modèle français » par excellence, sans mettre en branle toute une série de réflexes de pensées, de dichotomies et de catégories pesantes ayant plus à voir avec les représentations idéales et incantatoires forgées par les doctrinaires de tout poil qu’avec la réalité des pratiques. Pour n’évoquer qu’un seul de ces pièges attendus, critiquant la République, nous ne serions pas « universalistes », nous serions donc par conséquent « communautaristes » puisque nous sommes sommés par la logique un peu courte des débats imposés de nous mouvoir entre ces deux pôles. « Communautaristes » ! Et la République de frissonner face à ce double péril de communautés closes et dangereuses, et d’un modèle anglo-saxon agressif. Peut-être est-ce impossible mais nous ne souhaitons pas prendre notre place dans le grand jeu de la concurrence entre des modèles abstraits. La République dont nous parlons, nous la regardons dans ses œuvres et au ras de ses pratiques, non dans les discours qu’elle tient sur elle-même. Si nous dénonçons avec vigueur certaines œuvres de la République réelle comme la colonisation et la répression, l’exclusion et le racisme, nous ne perdons pas notre temps à évoquer la République rêvée, celle qui définit un monde qui n’a jamais eu d’existence ou si peu, et dont la seule fonction historique aura été de masquer, précisément, la République réelle... Nous ne sommes pas plus les ennemis de la République rêvée que de la Licorne bleue. S’il nous arrive d’en dénoncer l’usage idéologique, nous ne nous posons pas plus en ennemis qu’en partisans de ce que nous analysons simplement comme un mythe.

C’est pourquoi lorsque nous parlons de la République, nous ne parlons pas du républicanisme en général ou en théorie, ni de la République romaine ou florentine, mais d’une incarnation historique précise : le projet indissolublement colonial et républicain de l’Etat français tel qu’il fut élaboré par la IIIe République au moment où l’extension impériale de la France atteint son maximum, et tel que ses échos perdurent encore de nos jours. Un projet qui tout en recyclant des pratiques d’Ancien régime fait rupture parce qu’il accorde une place centrale à l’Etat français dans le processus colonial, ainsi qu’aux discours et technologies que l’Etat produit pour rationaliser et légitimer ce processus (mission civilisatrice, droit colonial...). Les manuels de droit coloniaux républicains insistent sur le « caractère étatique », ainsi que juridique de la colonisation moderne, inaugurée au XIXe siècle :

« La colonisation est une affaire d’Etat. Elle relève des gouvernements. Il faut bien comprendre le sens de cette affirmation. Pendant longtemps, la colonisation a été conçue d’une manière différente. Il se peut d’ailleurs que cette intervention de l’Etat soit précédée, préparée, facilitée par des initiatives privées. Ainsi en a-t-il été à l’origine de la formation de nombre de colonies. Mais, aussi longtemps que ces initiatives privées s’exercent seules, aussi longtemps que les gouvernants d’un Etat à civilisation européenne n’interviennent pas pour les guider, les contrôler ou les soutenir, il n’y a pas, à proprement parler, de colonisation. »

L’investissement de l’Etat dans la colonisation moderne a débouché sur la fabrication d’un droit racialisé qui posait une différence au sein des Français entre les « citoyens français » (les métropolitains ou les personnes issues de métropole) et les « sujets français » aussi nommés « indigènes » (les populations de l’Empire) :

« Nul n’ignore que, dans la métropole, tous les nationaux français, sans distinction d’origine, sont citoyens. Sans doute on réserve parfois le nom de citoyens à ceux qui bénéficient de l’électorat politique, c’est-à-dire aux nationaux remplissant certaines conditions d’âge et de sexe. Mais la notion de citoyen doit être entendue dans un sens plus large. (...) Les lois sont faites pour tous les nationaux français, sans distinction de race, d’origine, de religion, de situ soc. (...) La législation est unique et uniforme ; il n’y a pas plieurs catégorie juridiques de Français.

Dans la plupart des colonies, on se trouve en présence d’une situation différente. Les nationaux se divisent en deux catégories : les citoyens, dont le statut politique et juridique se rapproche de celui des habitants de la métropole, et les non-citoyens, ou sujets français, dont le statut est assez sensiblement différent.

L’existence de cette distinction s’explique assez aisément. S’il est normal de traiter la population d’origine européenne comme la population métropolitaine, il n’en va pas de même pour la population indigène. Celle-ci est très différente de civilisation et de formation. (...) En raison du degré de formation des indigènes et de leur nombre, une surveillance spéciale doit s’exercer sur eux. Il leur faut souvent un régime pénal et même un régime disciplinaire particuliers. Il y a là une nouvelle raison de la distinction des deux statuts. »

C’est bien entendu la différence de « civilisation », en bref la différence de mœurs et de coutumes, qui est supposée justifier d’une part la non-citoyenneté des indigènes de la République et d’autre part fonder le principe d’un régime punitif distinct du droit commun (le code de l’indigénat). Ainsi l’hétérogénéité « civilisationnelle » des indigènes justifie les discriminations et l’existence d’une nationalité à double vitesse. Et c’est l’assimilation, soit en fait l’adoption des mœurs, coutumes et normes (supposées uniformes) de la métropole, qui conditionne en grande partie l’accès aux droits civiques et politiques, ainsi qu’à l’égalité de traitement en matière pénale.

Le racisme juridique et étatique qui accompagne la formation de la IIIe République persiste peu ou prou jusqu’aux décolonisations, il constitue l’une des conditions de possibilité de l’imaginaire raciste français et n’est sans doute pas sans effet sur la situation actuelle. La question mérite à tout le moins d’être posée et examinée d’un point de vue politique.
[...]

4) En distinguant entre initiateurs et soutiens, vous reprenez un mode d’agencement binaire et manichéen du type les « victimes et leurs ami(e)s », déjà difficilement justifiable au moment des décolonisations mais assurément périmé. Comment se reconnaître dans cet appel sans être « issu des anciennes colonies » et autrement que sur le mode de la culpabilité ou à titre de force d’appoint ? Et d’abord de quel « nous » parlez-vous ?
[...]

... il n’est pas besoin de brandir son arbre généalogique pour participer à un mouvement des « indigènes de la République ».
[...]

7) Vous êtes communautaristes. En employant le terme d’« indigène », une catégorie juridico-administrative stigmatisante produite par la République pour désigner l’ensemble des populations colonisées de son empire, ainsi que leur assujettissement, nous ne revendiquons pas d’autre communauté que celle qui subit, reconnaît et critique activement l’intériorisation de certaines normes coloniales par le pays dans lequel nous vivons.

Cela dit, c’est plus pour ce qu’il sous entend que pour ce qu’il énonce expressément que le grief de « communautarisme » nous choque. Et plutôt que de répondre à ce grief, nous entendons le critiquer. De quoi parle-t-on, dans le débat français, lorsque l’on parle de « communautarisme ».

dimanche, décembre 18, 2005

Fw: Fraudes et irrégularités électorales en Irak

LE COMITE DE DEFENSE DES DROITS DES TURKMENES IRAKIENS (BELGIQUE) A ADRESSE LE COMMUNIQUE SUIVANT AUX MEMBRES ET AUX COMMISSAIRES DU PARLEMENT EUROPEEN
Mons, le 14 décembre 2005.

OBJET : FRAUDES ET IRREGULARITES ELECTORALES EN IRAK
Les élections générales en Irak du 30 janvier 2005 ont été entachées par de multiples irrégularités et fraudes qui ont permis à la coalition des partis kurdes (KDP et PUK) de rafler non seulement la totalité des sièges des trois provinces qui sont sous leur contrôle depuis 1991 (Arbil, Duhok et Sulaymaniya) mais aussi de s’approprier la majorité des sièges dans les autres provinces du nord du pays (Kerkuk, Salahaddin et Diyala) où ils sont nettement minoritaires, au détriment des Arabes, des Turkmènes et des Chaldo-assyriens.

Ces fraudes et irrégularités ont permis à la coalition des partis kurdes de s’approprier 55 sièges sur un total de 275 et de devenir ainsi le deuxième groupe parlementaire le plus important du pays et de s’imposer sur le plan national comme un groupe parlementaire incontournable pour former le gouvernement et diriger le pays avec un pouvoir nettement disproportionné par rapport à sa représentation réelle dans le pays.

Les organisations et partis politiques turkmènes ont dénoncé en son temps les fraudes et irrégularités commises lors de ces élections et ils ont adressé des lettres de protestations le lendemain des élections à la Commission Indépendante des Elections en Irak (IECI) pour contester les résultats des élections, notamment pour les raisons suivantes :

1 - La participation de 86.000 électeurs kurdes irrégulièrement enregistrés sur les listes électorales de Kerkuk alors qu’ils n’étaient pas résidents de cette ville. Ils y avaient été amenés par les partis kurdes après l’invasion et l’occupation du pays en mars 2003 pour changer la composition ethnique de cette ville et y imposer leur hégémonie.

2 - L’empêchement de centaines de milliers d’électeurs turkmènes de Tal Afar, de Musul, de Kerkuk, de Tuz Khurmatu, etc… d’exercer leur droit de vote sous de multiples prétextes par les activistes des partis kurdes et leurs milices (peshmergas) qui contrôlaient de facto le déroulement des élections dans ces régions.

3 - L’organisation d’une fraude électorale dans la région sous leur contrôle dans le but de gonfler le nombre de votants en faveur de la coalition des partis kurdes en permettant à des milliers de leurs partisans de voter plusieurs fois dans les mêmes centres de vote et en organisant le transport de milliers de leurs partisans pour qu’ils puissent voter dans plusieurs centres de vote le jour des élections.

4 - L’anarchie dans la collecte des urnes après la fermeture des bureaux de vote, irrégularités de comptage, substitution des bulletins de votes, etc…

Les copies des lettres de protestation des partis politiques turkmènes ont également été adressées au Secrétaire Général des Nations Unies ainsi qu’aux parlementaires et Commissaires Européens pour les informer des fraudes et des irrégularités constatées lors de ces élections et pour solliciter leur aide afin que les prochaines élections en Irak puissent se dérouler dans des conditions meilleures et démocratiques.

La Commission Indépendante des Elections en Irak (IECI) après vérification des listes électorales de Kerkuk avait accédé à la demande des partis turkmènes et elle avait effectivement supprimé les noms des 86.000 électeurs irréguliers des listes électorales de Kerkuk pour les élections du 15 décembre 2005, mais malheureusement, encore une fois sous les pressions des partis kurdes cette commission vient de faire un volte face en dernière minute.

En effet on vient d’apprendre que non seulement la Commission Indépendante des Elections en Irak a annulé la décision qu’elle avait prise auparavant concernant la suppression des noms des 86.000 électeurs irréguliers des listes électorales de Kerkuk, mais elle qu’elle a accepté l’enregistrement de milliers d’autres électeurs irréguliers sur les listes électorales de Kerkuk !

Ces décisions de dernière minute prises par la Commission Indépendante des Elections en Irak (IECI) en faveur des partis kurdes et au détriment des turkmènes vont fausser les résultats des élections dans la province de Kerkuk et leurs enlever toute crédibilité.

Le Comité de Défense des Droits des Turkmènes Irakiens dénonce les pressions exercées sur la Commission Indépendante des Elections en Irak par les partis kurdes et condamne la décision de cette Commission qui permet à des dizaines de milliers d’électeurs irréguliers de voter à Kerkuk Nous demandons à la Commission Indépendante des Elections en Irak de revenir sur sa dernière décision et d’annuler une fois pour toutes les noms des 86.000 électeurs irréguliers sur les listes électorales de Kerkuk et de refuser l’enregistrement de nouveaux électeurs irréguliers et illégaux à Kerkuk.

Nous regrettons l’absence d’observateurs européens lors de ces élections et nous demandons aux parlementaires et commissaires européens, ainsi qu’aux responsables politiques en Europe de réagir et de condamner de telles pratiques qui sont contraires aux principes élémentaires de la démocratie.

Hassan AYDINLI
Président du Comité de Défense des Droits des Turkmènes Irakiens - Belgique



Ci-dessous la traduction du Communiqué du FRONT TURKMENE IRAKIEN (ITF):

COMMUNIQUE DE ITF (IRAQI TURKMEN FRONT) - FRONT TURKMENE IRAKIEN KERKUK - IRAK
(Traduction)

La démocratie nécessite justice, transparence et honnêteté.

Sur base de ce principe nous avions relevé plusieurs fraudes et mesures électorales illégales dans la province de Kerkuk lors des élections précédentes le 30 janvier 2005 et nous les avions rapportées à la Commission Independante des Elections en Irak (IECI) qui suite à nos contestations avait annulé 86.000 noms d'électeurs illégaux qui avaient été enregistrés sur les listes électorales de Kerkuk.

Cependant, au dernier moment et juste avant les élections du 15 décembre 2005, cette commission a fait volte-face et vient de prendre deux décisions:

- le rétablissement des listes électorales de Kerkuk et la réinsertion des noms des 86.000 électeurs illégaux qui avaient été admis sur les listes électorales de Kerkuk juste avant les élections du 30 janvier 2005

- l'enregistrement de dizaines de milliers d'autres "nouveaux électeurs irréguliers" sur les listes de Kerkuk pour les élections du 15 décembre 2005.

Ces décisions prises par la commission, incontestablement sous certaines pressions, sont contraires aux règlement des élections. Elles ont pour but de favoriser certains partis politiques.Le Front Turkmène Irakien condamne avec fermeté ces décisions illégales et il demande à la Commission (IECI) d'annuler ces deux décisions et d'empêcher que le processus électoral soit faussé par des manipulations et influences politiques.

Le Front Turkmène Irakien demande à la commission des élections (IECI) de revenir sur ses décisions de dernière minute par lesquelles elle permet de nouveau aux 86.000 électeurs illégaux d'être enregistrés sur les listes électorales à Kerkuk et aux dizaines de milliers d'autres 'nouveaux électeurs illégaux' de participer aux élections à Kerkuk.

Le Front Turkmène Irakien lance un appel aux organisations internationales et aux partis politiques, notamment en Europe, pour qu'ils interviennent rapidement pour garantir le bon déroulement des élections du 15 décembre 2005.

Le Front Turkmène Irakien tient à informer les autorités politiques en Irak qu'il contestera les résultats de ces élections s'il n'est pas tenu compte de ses demandes et dans le cas où des irrégularités seraient acceptées lors de ces élections.

Le Front Turkmène Irakien
Kerkuk - Irak
le 12.12.2005